Trop éthique pour être au net ?

IV - Clés du succès de la communication humanitaire sur Internet



    Annexes



Malgré les risques liés aux logiques économiques à l’œuvre sur le réseau mondial et à la " déréalisation " inhérente au média même, Internet peut être, nous le croyons, un formidable atout au service du secteur caritatif. A condition que celui-ci sache utiliser et développer son potentiel virtuel, et échapper aux pièges qu’il recèle. Nous avons pu, au fil de cette étude, dégager quelques facteurs-clés de succès des ONG sur le net : nous essaierons dans cette dernière partie d’en aborder quelques autres, notamment à partir de l’étude a contrario de l’échec d’un site emblématique : NetAid. Il nous servira à montrer que la philanthropie sur Internet ne pourra qu’échouer si elle se contente de copier servilement les recettes qui ont réussi dans le domaine du commerce électronique.


A. Un exemple emblématique : le site de NetAid

Le site NetAid, déjà évoqué, est une coûteuse machinerie mise en place par Cisco et l’ONU pour lutter contre la pauvreté dans le monde, et annoncée avec une débauche de moyens médiatiques sans précédent. Il fut lancé par un concert en triplex (Londres, New York, Genève) auquel participèrent de nombreuses personnalités (Bono, David Bowie…), et que près d’un milliard d’habitants de la planète pouvaient suivre à la radio, à la télévision, ou en direct sur Internet.

1. Un échec paradoxal

Dans les semaines qui suivirent, les organisateurs claironnèrent leur triomphe : plus de 40 millions de pages visitées sur leur site, et 12 millions de dollars de fonds collectés… Mais on apprit ensuite que sur ces 12 millions, 11 avaient été déboursés par les deux principales firmes partenaires du site, et qu’à peine un million provenait des recettes des trois concerts en direct et des dons des particuliers en ligne. D’après Francis Graham, 3,5 millions de personnes au maximum ont visité le site de NetAid durant le concert, et en admettant que le don moyen ait été de 10$ (les moyennes observées en ligne sont bien supérieures), cela représente à peine 100.000 donateurs, soit 3% environ des visiteurs. Un bien maigre résultat pour une association qui ne fonde sa viabilité financière que sur la collecte en ligne…

L’un des organisateurs, Ken Kragen, qui produisit également le concert Live Aid en faveur de l’Ethiopie en 1985, livra au Washington Post son explication de cet échec : " en 1985, les gens voyaient les images [d’Africains faméliques] pour la première fois. Aujourd’hui, nous voyons un désastre par semaine, que ce soit le tremblement de terre en Turquie, ou le Timor oriental, ou la catastrophe aérienne au Mexique. Les gens s’y sont habitués, malheureusement ". Comme le remarque Francis Graham, l’explication par la " fatigue compassionnelle " est un peu courte : comment expliquer le succès de la Croix-Rouge américaine, qui collecta plus d’un million de dollars chaque mois pendant la crise du Kosovo, avec des moyens publicitaires infiniment moindres que ceux mis en œuvre par NetAid ?

Techniquement, le site de NetAid est pourtant parfait, tant du point de vue de son architecture (une navigation simple, des liens qui permettent de se repérer facilement), que de ses performances : mis au point par le géant américain Cisco comme une vitrine de son savoir-faire, il permet des téléchargements fiables et rapides quelque soit le navigateur utilisé, un nombre de visiteurs simultanés vertigineux, et son apparence graphique est superbe. Le site a une solide structure de marque (un nom clair et facile à communiquer, et son logo sur toutes les pages du site), et sa communication s’intègre dans un plan stratégique d’ensemble, s’appuyant aussi bien sur les médias traditionnels que sur le net.

2. La question du contenu

Il semble en fait que les créateurs de NetAid aient échoué en voulant transposer mécaniquement les " recettes " des sites commerciaux sur un site à finalité humanitaire.. Or, tous les professionnels s’accordent à reconnaître que dans le secteur caritatif – et particulièrement si l’association entend impliquer les gens et leur demander du temps ou de l’argent - un seul élément est vraiment déterminant bien qu’on ne puisse en estimer le prix : le contenu

Celui-ci n’est pas seulement un flux d’informations, mais doit être pensé en fonction du public visé, et de l’environnement (y compris hors Internet) dans lequel ce flux va se déployer. Si les internautes n’ont pas le sentiment que l’information s’adresse à eux personnellement, répondant à leurs besoins et leurs intérêts, il la chercheront ailleurs.

Comme le pointe Eric Miller, du Philanthropy News Network, les créateurs de sites caritatifs doivent " garder en tête qui vient sur leur site, et pourquoi. Les gens viennent rarement sur Internet avec l’idée de faire un don… La collecte de fonds en ligne partage nombre des caractéristiques de la collecte hors-ligne. Vous devez toujours cultiver vos donateurs, et toujours demander et recevoir de l’argent ".
L’échec de NetAid provient essentiellement de ce qu’il n’a pas su " cultiver " ses donateurs potentiels, leur proposer le bon environnement, et comprendre leurs besoins.

La page d’accueil est à cet égard extrêmement révélatrice : on y trouve un accès aux cinq principales sections du site, sous des intitulés sibyllins : " What works ? " (mais pour qui ?), " Take action " (mais à quel sujet ?), " What ‘s new ", " The concert " et " About NetAid ". Aucune accroche fédératrice ne venait initialement rassembler les buts de l’organisation en un message simple à mémoriser pour l’internaute, attiré sur le site par mille raisons possibles (principalement voir le concert), avec autant de degrés d’implication imaginables… Ceci a été corrigé par la suite, et on trouve désormais le slogan "  The power to end extreme poverty is now on line " (le pouvoir de mettre fin à l’extrême pauvreté est aujourd’hui en ligne).

En entrant dans le détail des textes de la section " What works ", on trouve une série d’études sur différents thèmes (de la réduction de la dette du tiers-monde au droits de l’homme), visiblement conçus davantage pour motiver d’éventuels donateurs que pour les informer en détail. Les textes sont à la fois peu accessibles pour un visiteur non averti des problèmes de l’humanitaire, et trop simplistes pour ceux qui souhaitent aller dans le détail, et comprendre les raisons profondes des phénomènes de dette, de famine, etc. Surtout, ils ne donnent aucune explication sur la spécificité de NetAid, et ce que cette ONG entend faire pour combattre la misère. Comme le note Francis Graham, on ne trouve rien que les " platitudes motivationnelles " de l’ONU.

En fait, le site est sans visage, il n’y a pas de témoignages, pas de forum de discussion en direct (avec, pourquoi pas, la participation des artistes présents au concert), aucun élément permettant de créer une communauté virtuelle, aucun espace d’échange et de dialogue qui donnerait corps à la cause mise en avant par NetAid, et où les internautes se sentiraient tant soit peu membres d’un mouvement global. Ne reste qu’une immense machine froide, un isoloir où des millions de visiteurs se côtoient sans lien, un " bluff technologique " comme aurait dit le regretté Jacques Ellul…


B. Eléments-clés d’une communication sur le don réussie

Voyons à présent – à travers des exemples de réussites concrètes - les éléments qui peuvent favoriser l’efficacité d’une ONG dans sa collecte de fonds sur Internet, ainsi que quelques pistes prometteuses pour l’avenir.

1. Attirer les visiteurs et créer une relation basée sur la confiance

Comme pour tout site web, il s’agira en premier lieu pour chaque ONG de créer puis d’augmenter le trafic sur son site, et de séduire de nouveaux visiteurs.

VISIBILITE

Nous n’aborderons ici que les aspects concernant la communication en ligne, la communication traditionnelle des associations (par mailing, annonces presse, spots télévisés…) ayant fait l’objet de nombreuses études par le passé. Nous espérons avoir montré que l’Internet est devenu une pièce incontournable du " communication mix " des associations. Reste à articuler celle-ci avec les autres moyens de promotion et de diffusion.

Afin de guider notre propos, nous reprendrons les résultats, évoqués dans la première partie, du sondage réalisé par The Melman Group en septembre 1999. Cette étude montre que 31% des internautes socialement engagés sondés déclaraient découvrir de nouveaux sites associatifs par le biais de moteurs de recherche, 34% par le bouche à oreille, 33% par la publicité hors ligne, 22% par les articles de presse, 18% par des liens dans les messages électroniques, 14% par des bannières publicitaires et enfin 11% par des informations émanant de sponsors. Nous reprendrons tous ces points un à un.

  • Moteurs de recherche

Aussi évident que cela puisse paraître, pour qu’un site attire des visiteurs, encore faut-il que ceux-ci le découvrent. Lors de notre recherche documentaire, nous avons saisi " Ligue nationale contre le cancer " dans différents moteurs, en vain : le site de l’association existe pourtant mais, récemment ouvert, il n’est pas encore répertorié par ceux-ci. Un donateur potentiel n’a probablement aucune chance de le découvrir, d’autant que son adresse n’est pas très simple : http://www.ligue-cancer.asso.fr.

Même des sites d’ONG très connus comme celui de la Croix-Rouge doivent l’essentiel de leurs visiteurs aux moteurs de recherche. Une des premières étapes pour faire connaître un site caritatif sera donc de l’inscrire dans le plus grand nombre de moteurs de recherche, avec des mots-clés pertinents, en lien avec les campagnes de donation. Un webmestre ne devrait pas être obsédé par le classement de son site dans les dix premiers pour la requête " humanitaire " par exemple, mais s’assurer que le mot clef " Kosovo " est valide si la campagne de collecte de don de son association porte sur l’aide aux réfugiés kosovars…

  • Bouche à oreille

Le caractère " désintéressé " des sites caritatifs se prête particulièrement à une propagation par le bouche-à-oreille, dont témoigne l’incroyable succès du Hunger Site , parvenu en quelques mois à un trafic de l’ordre de 300.000 visiteurs/jour grâce à quelques articles de presse mais surtout un effet de contagion " mail-to-mail " entre les particuliers. Pour que cette contagion atteigne son plein effet, encore faut-il que le site soit conçu autour de ce que les spécialistes du marketing appellent une " unique selling proposition " : une idée simple, pertinente et facile à communiquer. Ainsi pour The Hunger Site : " cliquez et cela permettra d’offrir gratuitement de la nourriture aux affamés du tiers-monde ". Un site associatif institutionnel qui brasse une masse d’informations et de projets aura donc intérêt à isoler un élément se prêtant à ce type de contagion. Nous verrons plus loin qu’une des possibilités sera alors de créer un site spécifique pour une action ponctuelle, dont la communication sera ainsi facilitée. Dans tous les cas le minimum à faire sera s’insérer l’adresse du site au bas de chaque mail expédié par une association…

  • Publicité hors ligne

Du fait de son coût, celle-ci sera réservée aux associations importantes. Et, compte-tenu des résultats actuellement modestes du don en ligne, il s’agira principalement pour les ONG d’intégrer l’appel au don par Internet dans leurs campagnes de publicité traditionnelles.

  • Relations presse

Bien entendu, les relations presse restent un outil indispensable, qu’il s’agisse de journaux on ou off line. Mais les ONG doivent ici valoriser ce qu’elles ont de plus précieux : leur contenu. En ce sens, il s’agira moins d’annoncer régulièrement telle ou telle campagne ou refonte du site Internet que de devenir pour les journalistes une ressource, une source d’information habituelle pour telle ou telle question. L’ONG PlaNet Finance, spécialisée dans le micro-crédit, a ainsi obtenu de très bonnes retombées presse grâce à la notoriété de son fondateur (Jacques Attali), mais également en s’imposant comme " la " source d’information en ligne sur le sujet.

  • Parrainage d'une personnalité charismatique

Pour obtenir de l'espace sur les sites à fort trafic, dont les dirigeants adopteront à n'en pas douter l'attitude des patrons de chaînes télévisées hertziennes (course à l'audience, recherche de sujets consensuels…), une solution envisageable sera pour une ONG de recruter une personnalité charismatique (ce que les anglo-saxons appellent un "anchor man"), apte à porter les couleurs de sujets difficiles, réputés anxiogènes et donc… néfastes à l'audience. L'idéal serait de trouver une des - rares - personnalités médiatrices de causes transgénérationnelles, capables de réunir sur leur nom les jeunes (utilisateurs de l'Internet) et les générations plus âgées (qui donnent de l'argent aux causes). Quelqu'un comme le champion de judo David Douillet en fournit un bon exemple.

  • Messages électroniques

Nous avons vu que la collecte des adresses e-mails des donateurs, prospects et contacts est devenue un enjeu stratégique majeur pour les associations. Cet outil bon marché est irremplaçable pour annoncer le lancement d’un site, les résultats d’une campagne en ligne, informer et séduire. Encore faut-il l’utiliser efficacement, et ne pas dépasser la ligne de partage incertaine que les internautes établissent entre leur vie privée et une communication acceptée. Un mail régulier qui informe des activités de l’ONG pour laquelle un internaute a témoigné de son intérêt peut ainsi paraître une pratique acceptable. Au delà, l’ONG aura probablement intérêt à créer une liste de diffusion, que les abonnés pourront quitter à tout moment. Dans tous les cas, les associations caritatives se doivent de respecter les codes informels du net : éviter le spam (" mails non sollicités ") , établir – et respecter ! -une charte fixant sa politique par rapport au respect de la vie privée, être enfin le plus transparent possible sur la façon dont elle aura obtenu l’adresse e-mail d’un internaute (" vous avez visité tel site, êtes membre de telle liste de diffusion, avez assisté à telle conférence…).

Le débat sur l’utilisation des informations collectées par le biais du net fait rage actuellement dans toutes les ONG américaines, et commence à préoccuper celles du vieux continent : que faire des adresses e-mail collectées ? Les ONG peuvent-elles les revendre ? Problèmes soulevés par les mails non sollicités (" spam ") ?

Une étude récente de la Commission Fédérale du Commerce américaine a établi que 92% des américains se sentaient concernés par les abus potentiels concernant leurs données personnelles sur l’Internet

L’association américaine Oxfam qui a réfléchi à l’opportunité d’utiliser des listes de gens ayant accepté de recevoir des courriels à finalité commerciale, a finalement renoncé à cette possibilité. " un envoi d’e-mail " à froid " ne serait pas productif " note Shelagh Young, porte-parole d’Oxfam. Cette extrême prudence n’empêche d’ailleurs pas l’association de constituer sa propre base d’adresses e-mail, et de n’exclure aucune campagne d’e-marketing direct pour l’avenir. De la même façon, Médecins sans Frontières disposait en juillet 2000 d’un fichier de plus de 11.000 adresses e-mails, qui n’a pas été à ce jour utilisé pour la recherche de fonds.

Un " mailing électronique de masse " est potentiellement dangereux pour les associations, et risquerait de leur aliéner les sympathies qu’elles cherchent patiemment à s’attirer… Pour certaines associations, il soulève de plus de délicates questions de déontologie : ainsi l’Association pour la recherche contre le Cancer (ARC) reçoit des demandes d’information émanant de proches de malades : est-il question d’utiliser ces contacts, " acquis " dans la douleur, pour relancer d’éventuels donateurs ?

En fait, l’utilisation d’adresses e-mail n’a de sens que si elle accompagne un effort de personnalisation et de recherche des intérêts des internautes. Pour David Jones, Directeur exécutif de PopTel, un fournisseur d’accès associatif, " suivre les mouvements des visiteurs au sein d’un site, découvrir ce qui les intéresse, et ajuster le marketing direct en fonction est une fantastique opportunité d’expansion ".

  • Partenariats

Nouer des partenariats avec d’autres sites est probablement un des axes les plus prometteurs pour les ONG sur le net : nous avons vu toutefois dans la deuxième partie les risques qui y sont liés, et n’y reviendrons que brièvement ici. Face à la simplicité d’un échange de liens avec un site commercial chaque association doit évaluer scrupuleusement ce qu’il signifie, et ne pas mettre en péril son bien le plus précieux : sa réputation et la confiance du public. Aux Etats-Unis, la fragilité du monde associatif, coincé entre la rareté des subsides publics et un régime fiscal qui n’encourage guère les dons privés, a conduit les associations a de dangereuses compromissions : on a ainsi vu la très respectable American Cancer Society traînée devant les tribunaux pour avoir autorisé les fabricants de jus d’orange californiens à utiliser son logo, contre un million de dollars par an… générant ainsi auprès du public l’idée que ce jus était un meilleur agent anti-cancéreux que son homologue californien…

Parmi les possibilités de partenariats offertes aux ONG, les plus prometteurs sont ceux avec les sites-portails (la Croix-Rouge française a ainsi collecté 170.000F pour le Kosovo en grande partie grâce à un très efficace lien avec le portail Wanadoo), et également avec les sites d’information (journaux, radios, télévisions) : Ensemble Contre le Sida (Sidaction) doit l’essentiel du trafic sur le site dédié à sa campagne " 48h pour un vaccin " à son partenariat avec TF1.fr. On peut imaginer qu’à l’avenir, dans le cadre plus général d’échanges de contenus entre journalistes et ONG, on trouvera en marge des articles évoquant les urgences humanitaires sur les grands sites d’information, des liens directs vers les ONG qui interviennent dans les pays concernés.

Enfin, nous avons vu que les partenariats avec les sites de communauté peuvent être de très efficaces atouts pour le monde associatif : pour les développer, les ONG devront nécessairement développer des outils leur permettant de mieux connaître leurs donateurs et prospects en ligne, ce qui n’est pas encore le cas, du moins en France.

De même , pour évaluer l’efficacité des partenariats noués, les ONG devront investir dans des logiciels permettant de savoir de quel site viennent leurs visiteurs : à ce jour, aucune des 10 associations contactées en France n’en dispose…

  • Bannières publicitaires

Avant de se lancer dans une onéreuse campagne de publicité en ligne, toute ONG doit se poser la question suivante : " Pourquoi un visiteur va venir sur mon site ?". Si elle ne trouve pas de réponse, mieux vaut renoncer à la publicité… Beaucoup d’ONG créent un site pour expliquer leur mission, et y ajoutent un bouton " donnez maintenant " : elles pensent que sur la masse des internautes, il y en aura nécessairement une fraction pour venir voir leur site, et un pourcentage plus réduit certes mais réel, pour leur donner de l’argent en ligne. Ce calcul est évidemment faux : pour attirer l’attention de l’internaute parmi les dizaines de millions de pages du web (effet " pull "), tout site doit avoir un " atout compétitif ". Cela peut être sa richesse en informations (Amnesty International pour les droits de l’homme ou la Croix-Rouge pour les urgences humanitaires par exemple), sa richesse en produits (le site du Metropolitan Museum par exemple), ou encore en services (une librairie ou des cours en ligne par exemple, ou encore des " chats " avec des personnalités, des forums…).

Il est probable que la meilleure gestion par l’ensemble des sites de leurs espaces publicitaires raréfiera à l’avenir les espaces gratuits disponibles pour le secteur associatif. Les espaces restants risquent en outre d’être " vampirisés " par les portails de donation, qui proposent de donner à toute une série d’associations, et attireront de ce fait un nombre important de visiteurs.

Ainsi, aux Etats-Unis, l’Environmental Defense Fund (EDF), déjà évoqué, commença par placer des bannières publicitaires sur des portails et des sites importants de commerce en ligne, quémandant les espaces invendus… Cette ressource s’est peu à peu tarie, les grands acteurs de l’Internet ayant appris à mieux gérer leurs espaces publicitaires. De plus, le peu d’espace restant a été vampirisé par The Ad Council, une organisation qui crée des campagnes professionnelles sur le web pour les associations. " C’est une façon plus rationnelle de répartir l’espace au profit des associations œuvrant pour le bien public, reconnaît Bill Pease, un des responsables de l’EDF, mais cela a sérieusement écorné la possibilité pour une association individuelle de lancer une grande campagne de publicité en ligne ".

En France, les ONG devront négocier directement avec les éditeurs de sites une présence permanente sur la récupération de la "part de voix" disponible (les espaces publicitaires invendus). C'est la clef de la réussite de leurs campagnes, qui peut leur permettre de récupérer gratuitement de 100.000 à 500.000 PAP quotidiennes… jusqu'à ce que l'ensemble des ONG concurrentes adoptent la même démarche systématique, ce qui arrivera probablement très vite…

SPECIFICITE : UN SITE PAR CAMPAGNE ?

Un des moyens permettant d’accroître la visibilité d’une ONG sur le net consiste à démultiplier son site principal en lui adjoignant des sites satellites, lancés pour une campagne sur un thème particulier. Ainsi, Médecins sans Frontières a lancé son " Opération 1F par jour " par le biais d’un site dédié , dont la promotion était assurée par différents partenaires, la presse, diverses listes de diffusion… Bien entendu, un lien permettait de rejoindre le site principal de l’organisation.

L’American Civil Liberties Union (ACLU) a lancé un programme pour recruter de nouveaux membres : plutôt que d’utiliser son site Internet pour communiquer globalement sur ses actions, elle a préféré mettre en place trois campagnes distinctes sur des sujets bien spécifiés : civisme, problèmes raciaux, respect de la vie privée. Pour chacun, un site propre a été créé, avec diffusion de l’adresse URL dans des mailings-lists appropriées, liens sur des sites partenaires, messages par listes " opt-in ", communiqués de presse. Le programme a été un succès, et en confrontant la liste des participants aux 3 sites avec celle de ses donateurs habituels, l’ACLU a constaté que près de 90% des premiers étaient de nouveaux sympathisants.

Plus révélateur encore, le site Scorecard, mis en place par l’Environrnental Defense Fund (EDF), déjà évoqué, a permis de générer un important trafic grâce à des liens ou des bannières publicitaires sur des sites où les gens cherchent des informations locales : agences immobilières, portails de communautés, sites de villes ou de région… En délivrant une information très localisée, ce site satellite a attiré des centaines de milliers de visiteurs, qui n’auraient probablement jamais consulté le site-mère de l’organisation environnementaliste.

Un site satellite fondé sur une idée unique, facilement communicable, apparaît donc comme un excellent moyen de se faire connaître sur le web : la réussite de The Hunger site en témoigne : une idée simple et facile à expliquer, un site sommaire, et un succès phénoménal, amplifié par le bouche-à-oreille électronique.

Enfin, cette démultiplication des sites de l’ONG peut avoir un autre atout non négligeable : celui d’offrir aux sponsors de celle-ci une meilleure visibilité, en s’associant à un site unique, dédié à une campagne spécifique.

LA QUESTION DU RATING

La question centrale pour l’avenir de la donation en ligne sera celle de l’évaluation des différents sites mettant en avant une finalité philanthropique. Seule celle-ci permettra à l’internaute de se repérer dans la jungle des sites, et de juger de la transparence, de l’efficacité d’une ONG. Des sites comme Guidestar proposent déjà des catalogues raisonnés d’associations charitables, notées selon des critères financiers, fonctionnels ou communicationnels. L’accessibilité sur Internet des informations de ce type devrait rendre à l’avenir vitale pour les ONG l’obtention d’une bonne notation, avec le danger de soumettre la stratégie de l’ONG aux grilles de lecture de l’organisme certificateur ? On trouve sur le net plusieurs rapports et études établissant un comparatif des sites à vocation charitable, et notamment des galeries commerciales ; il est souvent difficile d’établir si leur auteur est un chercheur indépendant, un consultant privé spécialisé dans la recherche de fonds, ou le salarié d’une… galerie commerciale en ligne…

En France, le Comité de la Charte pourra à l’avenir jouer ce rôle " certificateur ", sur la Toile comme dans le monde réel : il est d’ailleurs significatif que cet organisme travaille actuellement sur le projet d’un site-portail voué à la donation en ligne aux associations…

2. Le choix stratégique du niveau de collecte

Les ONG devront par ailleurs réfléchir au " spectre " des donateurs qu’elles visent : veulent-elles collecter au niveau local, national, mondial ? De ce choix découleront des conséquences importantes en termes de coût, de logistique, de personnel et d’organisation du site.

Si la Toile est mondiale, la donation se heurte à des contingences bien réelles, liées aux souverainetés des Etats-nations. Elles sont de trois ordres : le choix de la monnaie dans laquelle les internautes vont libeller leur don, les barrières linguistiques, et les contraintes juridiques s’opposant à un don au profit d’une association basée dans un pays autre que celui de l’internaute donateur.

UNE COLLECTE MONDIALE ?

Le site américain Give To Charity, basé en Floride, accepte les donations au profit des ONG canadiennes. Mais les dons sont deux fois amputés par les opérations de change : les dollars canadiens du donateur sont convertis en dollars US pour être enregistrés sur le compte de Give to Charity, puis à nouveau convertis en dollars canadiens pour être ventilés entre les différentes associations bénéficiaires… Evidemment, si ce système permet aux ONG canadiennes de séduire des donateurs américains, la perte de change sera dans ce cas moindre…

En France, Médecins du Monde accepte actuellement les dons en Francs ou en Euros, et étudie la possibilité d’introduire d’autres monnaies. En fait, près de la moitié des visiteurs du site sont américains, et un grand nombre d’entre eux font des dons en Francs : ils payent dans ce cas les frais de conversion, en sus de leur don.

LA QUESTION DES LANGUES

Pour séduire les donateurs, encore faut-il qu’ils vous comprennent… ce qui implique un effort important concernant la traduction des sites, coûteuse en temps et en personnel. Les sites d’organismes internationaux comme le WWF ou MSF hébergent les pages de leurs sections nationales, et la plupart des grandes ONG disposent d’un site par pays. " Si l’Internet est global, le don est local ", résume Pierre-Bernard Le Bas, directeur marketing de l’Unicef.

Pour les nouvelles structures qui se veulent mondiales, la question est plus épineuse. Ainsi le site NetAid, crée en partenariat par CISCO et l’ONU, se présente comme " le " site de référence dans la lutte contre la misère dans le monde. Malgré ses ambitions planétaires, tous les textes (très denses et peu accessibles pour des populations non anglophones) sont en anglais, et il n’existe pas même une courte notice dans les principales langues de l’ONU (français, arabe, espagnol), ce qui donne au site une très fâcheuse image américano-centrée…

CONTRAINTES LEGALES ET REGLEMENTAIRES DU DON EN LIGNE

Le site américain Guidestar, qui répertorie plus de 600.000 associations américaines et permet aux internautes de leur donner en ligne grâce à un partenariat avec Helping.org précise dans ses avertissements légaux que l’appel public au don est " soumis à enregistrement et réglementation dans environ 38 Etats " américains. Et décline toute responsabilité si cet enregistrement n’a pas été fait de manière appropriée… dans tous les Etats concernés. Aux Etats-Unis comme en Europe, chaque Etat a sa propre réglementation de l’appel à la générosité publique, sa propre législation sur les associations, et le régime de déduction fiscale qui en découle.

Bien sûr, rien n’empêche théoriquement un donateur américain de faire un don à – par exemple – une ONG française. Mais le fait qu’il ne puisse recevoir de reçu fiscal – et donc bénéficier de la déduction correspondante – reste un frein certain. Pour le contourner, l’ONG française devra alors s’offrir " sa " fondation américaine, ce qui implique d’évaluer le ratio entre l’investissement à consentir et les profits à en espérer…

3. Supprimer les freins fonctionnels à la donation

Après avoir attiré des visiteurs et créé un sentiment de confiance envers l’organisation, il reste encore à passer l’étape du don, qui soulève de très nombreuses questions, qui sont autant de freins. Les problèmes de sécurité des transactions et de confidentialité des données personnelles sont les deux freins au don en ligne mis en avant par les internautes. A ces deux obstacles majeurs, on peut ajouter une série de " freins fonctionnels " ayant trait à l’ergonomie et à la lisibilité du site.

LA SPECIFICITE DES PAIEMENTS

Une enquête menée sur le site de l’association australienne Wesley Mission a montré que les internautes, pourvu que l’ONG lève leurs craintes concernant la sécurité des transactions et le respect de la vie privée, se déclarent très largement favorables au don en ligne : 65% des personnes interrogées se disent prêtes à donner par ce biais à la Wesley Mission (84% disent par ailleurs avoir déjà donné de l’argent à des associations). L’auteur de l’étude déduit également que les plus jeunes (moins de 45 ans) et ceux qui ont une pratique plus ancienne de l’Internet sont encore plus favorables au don en ligne. Mais, quoique vraisemblables, ces résultats ont peu de valeur scientifique compte tenu de l‘étroitesse de l’échantillon de départ (moins d’une centaine d’individus).

Contrairement au commerce en ligne, les internautes qui donnent sur Internet ne peuvent " voir " ce qu’ils " achètent "… mais les craintes concernant la sécurité des paiements sont identiques.

Une étude réalisée en septembre 2000 par ToTeam pour le cabinet DIA-MART, conseil en marketing et stratégie, est à cet égard extrêmement intéressante. Elle montre que tous les consommateurs, des non internautes aux internautes avertis et acheteurs, expriment des craintes envers Internet : c'est un univers fascinant mais non sécurisé, et le paiement en ligne vient cristalliser ces craintes.

Ainsi 64 % des internautes désignent le paiement en ligne comme un frein à l'achat sur Internet. Ces craintes sont d’ailleurs totalement irrationnelles : le vrai "danger" d'Internet est qu'il facilite la fraude à la facturette. Ce n'est donc pas de payer en ligne qui est dangereux - mais que quelqu'un paie en ligne avec votre numéro de carte, grâce à une facturette récupérée… dans le monde physique !

Conséquence de cette méconnaissance des risques réels, les solutions proposées aujourd'hui par les sites marchands répondent mal aux attentes des consommateurs : la notoriété et la crédibilité des réponses techniques sont faibles (SSL, SIPS, etc.). Les internautes sont conscients de manquer d'informations, mais restent peu réceptifs à un discours technique. Les techniques d'authentification, comme Cybercom ou le paiement par mobile ne sont pas encore massivement disponibles, et ce n'est pas à ce type de risques que l'internaute est le plus sensibilisé.

Les solutions "marketing" (garanties, informations, label, etc.) sont incomplètes et maladroitement exploitées. La plupart des sites privilégient un discours pédagogique, très orienté "sécuritaire". Or dans bien des cas, cette approche ne suffit pas, voire est contre-productive. Les internautes ne veulent pas de la sécurité mais de la confiance : les réponses les plus efficaces sont des signes de sécurité indirects, non objectivement liés au paiement : la notoriété (pour 70 % des internautes) et la présence de magasins physiques (pour 57 %).

Les sites caritatifs devront donc apprendre à doser le discours sur la sécurité en fonction de critères précis (notoriété, antériorité, cible, etc.) et surtout à le positiver. Le don sur Internet doit être un acte de liberté et de solidarité, ce qui est peu conciliable avec une approche trop "sécuritaire" et didactique sur le paiement.

Le recours à des cautions extérieures (banques, assurances, labels…) est efficace mais reste un aveu de faiblesse de la part du site, incapable d'assurer lui-même la confiance. Les sites doivent ancrer le virtuel dans le réel : tout ce qui peut maximiser les contacts avec l'internaute et montrer l’association et ses bénévoles derrière le site, contribuera ainsi à renforcer la confiance.

LE RESPECT DE LA VIE PRIVEE

D’après l’étude, déjà évoquée, conduite par The Mellman Group près de la moitié des 800 sondés se déclarent " très " ou " extrêmement " concernés par le respect de la confidentialité des informations personnelles échangées au moment d’effectuer un don en ligne. Nous avons vu plus haut les questions soulevées par la collecte systématique d’adresses e-mails. Toutes les ONG qui appellent au don sur le Net devront donc faire un effort important pour rassurer leurs donateurs, établir une charte fixant leurs règles en matière de " privacy ", et la respecter scrupuleusement. Cela d’autant plus que les moyens de collecter des informations personnelles se sont multipliées sur les site caritatifs, qu’il s’agisse d’offrir des économiseurs d’écran gratuits en échange de la réponse à un questionnaire (Unicef, Care, CICR, Accion…), ou des fameuses " cartes postales électroniques ", qui servent à la fois à la publicité du site (marketing viral) et à la collecte d’adresse e-mails (Care, notamment).

LES FREINS FONCTIONNELS ET ERGONOMIQUES

Francis Graham relève les 10 "plus fréquentes " excuses " mises en avant par les donateurs potentiels au moment de " passer à l’acte ". Nous nous inspirerons de son analyse, intéressante parce qu’elle se place du point de vue de l’internaute, pour évoquer les obstacles psychologiques et ergonomiques au don en ligne.

  1. " Je ne vois pas à quel endroit on peut donner"
  2. Tous les liens vers la donation en ligne doivent être très visibles, présents sur toutes les pages (témoignages, forums, news…). L’internaute ne doit jamais être à plus de 2 clics du module de donation.

  3. " Je leur donnerai plus tard "
  4. Il circule une histoire, probablement apocryphe mais non sans fondement à propos du site de la Croix-Rouge : lorsque le bouton de donation fut changé de " Donnez " en " Donnez maintenant ", le nombre des donations doubla…

  5. " Qu’est-ce que j’en retire ? "
  6. Si vous n’avez su convaincre les internautes que votre cause est valable, vous pouvez toujours tenter de les " acheter "… par exemple, " donnez et téléchargez gratuitement un CD de George Michael "… NetAid s’y est essayé, avec cette offre déconcertante : " recevez un CD gratuit avec votre Carte NetAid Visa ". Encourager les gens à souscrire une carte bancaire pour remédier à la faim dans le monde est vraiment une idée à part… mais des offres liées à l’objet social de l’association ne sont pas à écarter pour autant.

  7. " C’est trop compliqué "
  8. Chaque étape dans le déroulement du processus de don est un défi : à chaque page ou formulaire, l’internaute peut se décourager. Certains sites, comme celui de l’ONG américaine Oxfam, accompagnent le donateur tout au long de la procédure, en rappelant leur but, en donnant des exemples concrets de ce qu’un don particulier permettra de réaliser, en ajoutant des témoignages sur les effets de l’aide sur le terrain. Le formulaire de don commence souvent par une phrase qui réaffirme l’intérêt de celui-ci : " Oui, je souhaite aider le CICR à aider les autres " (Croix-Rouge), ou " Oui, je veux aider la NSPCC à mettre un terme aux abus concernant les enfants ", plutôt qu’un anonyme " Give " (NetAid)

  9. " Je ne sais pas quoi faire "
  10. Chaque système de donation est différent, et il est important de rassurer l’internaute-donateur, de lui expliquer le déroulement, avec un maximum de transparence : combien de temps va prendre la transaction ? Qui contacter en cas de problème ? Que faire en cas de blocage ? Si vous ne répondez pas à ces questions en prenant l’internaute " par la main ", la tentation sera grande pour lui d’appuyer sur la touche " page précédente " de son navigateur, et annuler toute la transaction. A cet égard, on ne dira jamais assez à quel point la présence d’un contact (téléphone, coordonnées postales ou e-mail) est importante pour rassurer l’internaute et donner une " présence " dans la froideur du monde virtuel… (Greenpeace a par exemple mis en place tout au long de ses pages web un bouton " Call me – Greenpeace quick response " très efficace).

  11. " Ce formulaire est trop compliqué "
  12. Le formulaire doit être aussi bref que possible, sachant que peu d’internautes disposent à l’heure actuelle des outils de " remplissage automatique " proposés par les versions les plus récentes des logiciels de navigation. Le formulaire de don de la Croix-rouge américaine est remarquable à cet égard, sa mise en page le faisant apparaître court, alors qu’il contient autant de champs que celui de NetAid, pour lequel l’internaute devra faire dérouler l’équivalent de trois pages-écran ! Chaque fois que cela est possible, les menus déroulants facilitent grandement la saisie du questionnaire.

  13. " Combien dois-je donner ? "
  14. Devant cette question tacite de l’internaute, deux solutions s’avèrent en pratique particulièrement efficaces : la première, utilisée par des sites comme Oxfam aux Etats-Unis ou PlaNet Finance en France, consiste à donner des exemples concrets de ce que différents montants permettront à l’association de réaliser : " Avec 100 euros (600 FF), un jeune de Bogota, en Colombie, peut acquérir du matériel pour la réparation de pneus : Il a un métier et gagne son indépendance " (PlaNet Finance) ou " 90$ permettent d’acheter de la nourriture pour 2 semaines pour une famille d’Amérique centrale déplacée par l’ouragan Mitch " Oxfam). Le deuxième procédé consiste à pré-remplir des montants indicatifs de don. Le Secours Populaire Français a un formulaire particulièrement élaboré, et présenté sous forme de " bon de commande " à plusieurs lignes, sur lequel s’affichent les différents montants possibles (100F, 200F, 300F, etc) et en face la quantité. Les quantités étant pré-remplies sur " 5 " ou " 2 ", c’est au donateur de les modifier, ou de supprimer des lignes, puis de cliquer sur un bouton pour " recalculer " le montant total de son don. C’est assez agressif, sans doute efficace pour augmenter le don moyen, mais on peut s’interroger sur l’impact à long terme de ce genre de pratiques sur l’image même du secteur philanthropique : les ONG ont sans doute gros à perdre en terme de valeur symbolique à calquer les formulaires de don sur des bons de commande…

  15. " Je n’ai pas confiance, ils ne vont pas utiliser mon argent utilement "
  16. Dans le cadre de l’étude de The Mellman group réalisée auprès d’un échantillon de 800 personnes, 38% des sondés déclaraient que l’emploi des fonds collectés est " une des choses les plus importantes " qui doivent figurer sur un site philanthropique. Qu‘il s’agisse des engagements concernant la " mission " de l’ONG (31%), des exemples de réalisations concrètes (25%), ou de l’indication de la part des dons affectés aux projets sur le terrain (27%).

    Il est donc vital pour toute association de savoir se présenter clairement, de fournir une FAQ visible en tous points du site, et de rendre enfin accessibles les informations financières (rapport annuel) et la part des dons servant effectivement sur le terrain. Ainsi Trickle Up, ONG américaine annonce sur son site que 88% des dons vont directement aux projets sur le terrain. L’Association pour la recherche contre le Cancer (ARC) et L’Association des paralysés de France (APF) donnent le détail de leurs ressources et de leur affectation (y compris les frais de collecte et de gestion des dons)

    En fait, les préoccupations concernant " où va l’argent " ne semblent pas différentes selon qu’on donne son argent sur le Net ou par un autre moyen, mais Internet permet d’y répondre simplement et à moindre coût.

  17. " Et qui sont ces gens d’abord ? "

38% des personnes interrogées dans le cadre de l’étude du Melmann Group considère que les informations basiques concernant l’ONG (adresse, contact, responsables…) sont des éléments primordiaux qui doivent figurer sur leurs sites.

Les ONG y jouent leur crédibilité, et le sentiment de proximité doit figurer parmi leurs priorités dans leurs relations donateurs.

4. Cultiver les donateurs actuels et potentiels

Après avoir attiré des visiteurs, et réussi leur transformation en donateurs, les associations caritatives rencontrent leur ultime défi : comment parvenir à fidéliser ces donateurs, quels services ou produits leur proposer, quel type de communication adopter pour garantir un flux de ressources réguliers… ? C’est sur cet enjeu majeur que se jouera leur réussite sur le Web dans les années qui viennent.

IDEALEMENT, NE JAMAIS DEMANDER D'ARGENT...

Idéalement, une communication associative sur le Web devrait pouvoir se passer d’appel à la générosité publique… Comme l’explique Betty McBride, responsable des relations publiques de l’ONG britannique Help the Aged, " les gens viennent sur notre site pour obtenir des informations ; ils ne s’attendent pas à être bombardés d’appels au don. C’est pourquoi nous devons maintenir la recherche de fonds à un niveau secondaire ".

Des programmes comme le " passeport " du WWF permettent de " cultiver " les donateurs, de les impliquer dans l’action de l’organisation, sans les relancer constamment pour des dons. C’est une question stratégique : parvenir à créer une relation de confiance telle que les sympathisants donnent de l’argent sans qu’il soit besoin de leur en demander…

Des sites tel Actionnetwork.org permettent ainsi aux internautes d’être alertés sur des sujets sociaux, humanitaires ou environnementaux, et d’envoyer en ligne des fax aux décideurs politiques. D’avril à novembre 1999, une vingtaine d’associations ont utilisé les services de ce site, générant plus de 50.000 fax. Cet activisme en ligne est une passerelle idéale pour favoriser ensuite les dons aux associations dans lesquelles les internautes se sont peu à peu impliqués.

Il s’agira là encore de bâtir une communauté, de créer le sentiment d’appartenance à un groupe. De nombreux outils disponibles sur Internet aideront à établir ce lien relationnel : les forums par thèmes, les listes de diffusion, les " chats " en direct, l’intervention de personnalités ou de spécialistes, les témoignages de bénévoles ou de personnes aidées par l’ONG, les lettres de donateurs, sans oublier les moyens multimédia qui permettent de rendre compte de l’action de l’ONG sur le terrain : photos, vidéos, musique… Le site de CARE propose ainsi un " voyage virtuel " au Népal, sous forme de photos articulées selon des liens dynamiques. Ce " voyage " sert à la publicité de l’ONG sur des sites partenaires, et également comme auxiliaire efficace du don : le bouton " donation " est visible sur chaque page…

REUSSIR UNE COMMUNICATION PERSONNALISEE

Un des atouts du net est de pouvoir collecter rapidement des informations sur les intérêts et préférences des donateurs potentiels, afin de personnaliser ensuite la communication. Encore faut-il que cela soit fait avec discernement… Sur le site de NetAid, l’internaute-donateur est ainsi invité à indiquer ses " intérêts ", dans un menu proposant des thèmes aussi digne d’attention que : " lutter contre la faim ", " aider les réfugiés ", protéger l’environnement ", " mettre fin à la dette du tiers-monde ", " protéger les droits de l’homme "… Il est probable qu’un internaute disposant d’une " conscience sociale " suffisante pour l’avoir attiré sur le module de don du site d’une ONG aura toutes les peines du monde à choisir entre des buts aussi nobles… Et on voit mal quel usage en terme de communication pourra être fait d’informations aussi peu pertinentes.

LE SUIVI DES DONATEURS

La dernière étape sera d’assurer un suivi on line des donateurs qui auront livré leur obole sur le Net. C’est encore loin d’être le cas en France : passé le message de remerciement automatique, Médecins sans Frontières ou la Croix-Rouge se contentent actuellement d’agréger leurs donateurs en ligne au fichier traditionnel du marketing direct, qui prendra ensuite le relais pour les relances éventuelles.

D’après Rick Christ, spécialiste américain de la collecte de fonds sur Internet, les ONG américaines qui assurent déjà ce suivi en ligne n’ont obtenu que de maigres succès dans la relance de leurs donateurs. Sans doute est-il trop tôt pour juger des résultats, et plus encore des formules (newsletters, e-mails…) aptes à séduire ces nouveaux donateurs.


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