A quand le Service Universel Internet ? Auteurs : Marie-Agnès Leplaideur, Michel Elie Organisations : Syfia, Observatoire des Usages de l'Internet Type de document : Chronique Référence : Problèmes Politiques et Sociaux, numéro 861, Documentation Française Date: 10 août 2001
Résumé : A partir de l'exemple concret de la pratique de Syfia International, agence de presse associative " Sud-Nord " cette chronique pose le problème de la fixation d'un service universel de l'internet dans des termes analogues à ceux décrivant le service universel de télécommunications défini par l'IUT et des conditions de son application effective. Article : Sans Internet, l'agence Syfia International, agence de presse associative " Sud-Nord ", qui regroupe 5 agences africaines et 4 agences du Nord, soit une soixantaine de journalistes dispersés dans 30 pays, du Canada à Madagascar, du Congo à la Belgique ne pourrait pas exister. Longtemps les relations au sein de Syfia se limitaient à l'envoi par les journalistes d'articles de leur choix à la rédaction centrale à Montpellier qui renvoyait quelques remarques par courrier. Difficile de faire mieux quand une lettre peut mettre plusieurs semaines à parvenir à son destinataire et que l'envoi d'Afrique d'un fax coûte 10 % d'une pige. A partir de 1996, l'utilisation du courrier électronique a donné à chaque agence membre de lassociation la possibilité de participer activement aux prises de décision et à la circulation de linformation. Début 2000, la conférence de rédaction mensuelle par " chat " a permis d'améliorer ce partenariat Sud-Nord. Elle réunit au sein d'une même salle virtuelle, une dizaine de participants de neuf pays différents sur trois continents. Les thèmes de l'ordre du jour préparé au préalable par courriel sont lancés par l'animateur et chacun apporte sa contribution. Les interventions apparaissent à l'écran précédées du nom de la personne qui " parle ". Pour certains, s'exprimer demande de prendre son temps et de peser ses mots ; ce mode de discussion oblige à formuler rapidement et brièvement sa pensée : il peut être perturbant, voire paralysant. Toutefois, l'habitude commence à être prise, les discussions s'animent, les distances géographiques sont abolies, un véritable travail en commun peut s'amorcer. Malheureusement, lignes téléphoniques surchargées ou serveur inopérant, à chaque conférence, un ou deux journalistes du Sud n'arrivent pas à se connecter ou sont inopinément déconnectés en cours de route et le coût de l'heure de connexion en Afrique conduit à limiter la durée et la fréquence de ces réunions. Hier les projets de coopération entre associations du Nord et du Sud se traduisaient essentiellement par des relations très épisodiques et déséquilibrées : échanges aléatoires de courriers, envoi d'argent ou de matériel, déplacements, essentiellement du Nord vers le Sud, vu le coût des voyages. Aujourd'hui, grâce à l'internet, les outils d'une forme plus étroite de coopération existent : cet exemple de " conférence de rédaction " montre le parti qu'on peut en tirer pour mieux impliquer les différents partenaires . Mais les partenaires du Nord et du Sud ne sont pas, malgré les apparences vraiment égaux devant l'outil internet : l'absence d'une qualité de service homogène et le coût disproportionné par rapport au niveau de ressources des utilisateurs du Sud, même s'ils disposent du matériel approprié, est un obstacle au développement équilibré de ses usages. L'égalité devant l'outil c'est bien l'objectif recherché le " Service Universel ", " l'un des principes fondamentaux qui sous-tendent un réseau téléphonique public " selon l' Union Internationale des Télécommunications. En 1995 cet organisme de normalisation des télécommunications mondiales en a précisé la définition dans son rapport annuel: - " universellement disponible (au plan géographique) ",
- " accessible (les utilisateurs sont traités sur le même plan en ce qui concerne le prix et la qualité du service fourni) ",
- " de coût raisonnable (en termes de pouvoir d'achat relatif de l'utilisateur) ".
Il serait opportun d'étendre l'application de ces excellents principes à l'internet bien que, dans la réalité, ils sont déjà bien loin d'être mis en pratique pour le téléphone. L'organisation pour financer ce " service universel Internet " d'une péréquation des revenus de l'internet au niveau mondial constituerait un pas substantiel dans la voie d'une coopération plus équilibrée entre pays du Sud et pays du Nord. Michel Elie (Observatoire des Usages de lInternet http://archive.oui.net ) Marie-Agnès Leplaideur (Syfia ; http://www.syfia.com) |